top of page
Rechercher
lartdelachamanka

Oser parler de la mort


Accompagnement Thana, accompagnement de la fin de vie


Photo d'un énorme pissenlit sur fond vert foncé avec des reflets lumineux dessinant des traits blancs. En bas de la photo, au centre apparaissent des bouts de doigts tenant la tige de cette fleur. Elle est formée des petits plumeaux typiques de cette fleur, comme des anges ou des petits parachutes. Sur le haut de la fleur des plumeaux se défont et s'envolent sur la gauche et sur la droite.


J'ai déjà eu l'occasion sur différents articles de blog de parler de la mort. Je vous les partage à nouveau si cela vous dit de les lire ou les relire.


Aujourd'hui, j'ai décidé, avec son accord bien entendu, de vous partager le témoignage d'Aurélie. Notre rencontre comme elle va vous le dire ci-dessous a eu lieu lors de la Retraite Fille de la Terre, organisée par Emmanuelle Guiard-Paulos. Et l'accompagnement Thana s'est prolongé lors du WE de la l'art de la Chamanka “Thana, parler de la mort”, ce week-end à Marguerittes chez les Z'âmes en mots où Laurie et Audrey nous ont accueillies pour l'occasion.

Je sais que ces espaces sont indispensables au mieux être des personnes, ces espaces où nous pouvons parler librement, sans filtre, sans restriction de la mort.

Cela implique d'ouvrir son intime, quel que soit le deuil engagé, deuil symbolique, deuil réel.

Cela permet au processus de deuil, qui je le rappelle ici est un processus naturel, de prendre enfin sa place, d'être considéré et surtout accompagné.



Sur fond noir, la lune décroissante laisse apparaître un bout d'elle-même lumineux, dans des tons blancs jaunes. Sur le devant, on devine des nuages  gris et jaunes.



Témoignage d'Aurélie "j'ai peur de la mort"

Je remercie Aurélie d'avoir accueilli ma proposition, celle de mettre des mots sur son histoire. Ceci contribue à accompagner encore ce chemin qu'elle reconnaît comme étant le sien.

Son témoignage est touchant, authentique et tellement plein de vie et d'espérance.



Petite présentation avant que vous commenciez à lire ce que j’appellerai « le résumé non exhaustif de ma vie ». J’ai 38 ans, en couple depuis bientôt 20 ans, l’heureuse maman de 2 magnifiques filles de 7 ans et 8 mois.

Je me lance dans ce long récit pour que vous compreniez à quel point le week-end Thana : parler de la mort auquel j’ai participé, m’a profondément changée… pourtant les peurs et les croyances étaient profondément ancrées et cela depuis bien longtemps !

L’utilisation du mot « mort » a été jusqu’à il y a peu quasiment impossible pour moi. Confrontée à elle pour la première fois de façon assez violente avant d’avoir 7 ans en 1992, je me souviens de cris, de pleurs, d’un tourbillon de tristesse incompréhensible pour mes yeux de petite fille.

Voir ma mère dans cet état de tristesse, colère… j’ai eu peur ! Elle venait d’apprendre la mort du fils de sa meilleure amie qui avait 19 ans. La jeunesse ajoutant encore plus à cette injustice et cette douleur.

Je me revois lors des cérémonies, fermer un œil puis l’autre, pour ne pas regarder le cercueil. Ce que je ne comprenais pas, je me le suis imaginé et pas forcément de la meilleure des façons. Cette boîte que je voyais parfois quand on rendait visite à la meilleure amie de ma maman, je sentais bien que c’était pas une boîte comme les autres, j’ai compris plus tard que c’était l’urne.

Aujourd’hui, je suis maman d’une petite fille de 7 ans et je sais ce qui s’est passé… on ne m’a pas expliqué, on ne m’a pas préparée à vivre ça.


On ne savait pas encore à ce moment là de quoi l’avenir serait fait. Pas de nuages à l’horizon, si ce n’est quelques « querelles » familiales dont j’ai été témoin.

Le quotidien a repris les rênes des vies de chacun. J’étais écolière avec toute l’insouciance que je pouvais avoir les jeux, les rires, les copains, les animaux avec lesquels je passais beaucoup de temps… le bonheur quoi !


Aux alentours de l’année 1995, les choses se sont peu à peu compliquées. Mon grand-père maternel ayant fait un AVC, je dois le voir malade sans vraiment comprendre ce qu’il lui arrive. Il est décédé en 1996, je suppose que j’ai du assister aux cérémonies mais je n’en ai pas du tout de souvenir.

Le mécanisme de protection avait commencé à se mettre en place !

A partir de là, la mort est devenue ma compagne de route… une sacrée route tortueuse !

Je connais les dates, je sais ce qu’il s’est passé, peut-être parce qu’on me l’a raconté ou que j’ai décidé de combler les oublis. J’ai surtout décidé de vivre en acceptant que j’avais oublié !


La route a commencé par la maladie de ma mère, longue maladie qui l’a épuisée jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus lutter. Elle s’est laissée emporter en 1997. On m’a tenue à l’écart, je ne suis pas allée aux cérémonies, on a décidé pour moi « pour me protéger ». J’avais 12 ans, j’aurais du pouvoir choisir.

L’urne a été ramenée à la maison… je ne devais pas savoir où elle était mais je la sentais, chaque fois que je passais juste à côté. Et je me figurais que ma mère était là dedans.


Mon père ne s’ est jamais remis de la disparition de ma mère. J’avais mal pour lui chaque fois que je le regardais, tout me rappelait sans cesse qu’elle n’était plus là et qu’il était seul. Il faisait bien semblant pour moi… il a fait tout ce qu’il a pu. C’est à ce moment là que je suis allée vivre chez ma tante et mon parrain. Ils habitaient à côté du collège, c’était plus simple… Il venait me voir très souvent, c’était tellement plus simple que si il avait eu à élever seul une adolescente de 13 ans.

Nous avons rapidement su qu’il était malade… cette p***** de maladie frappait à nouveau.

Les traitements, les opérations… tout a été tenté. Il s’en est allé le 21 novembre 1999. Il avait neigé dans le sud ce jour là, J’étais en train de faire un bonhomme de neige quand j’ai appris la nouvelle… nous n’avions pas pu lui rendre visite à l’hôpital de Marseille à cause de la météo… la douleur, la tristesse m’ont submergée… il avait promis qu’il ne m’abandonnerait jamais !

Je me souviens de l’arrivée du cercueil sur le parvis de l’église… le glas assommant qui sonnait, la peur qui m’a tétanisée … j’ai demandé à partir et je suis partie. Hasard malheureux des dates, c’était le jour de mes 14 ans.

J’ai revue l’urne au cimetière… Elles étaient enfin rassemblées avec celle de ma mère.

Notre histoire ( j’ai un grand frère et une grande sœur) a tellement touché les gens qu’ils nous ont fait « une cagnotte »… et moi je me disais, qu’est ce que je peux bien en avoir à faire de leur pognon… je suis toute seule maintenant !


Voilà donc les deux grands traumatismes de ma vie… orpheline à 14 ans mais toujours très entourée par la famille. Je vivais chez ma tante et mon parrain. Un juge avait même officiellement donné ma garde à ma tante. J’étais un peu ce lien entre tous dans la famille. J’étais la plus petite mais j’avais l’impression de tenir tout le monde à bout de bras. Quand j’allais bien, tout le monde allait bien… alors on sourit et surtout on ne flanche pas !


Les décès se sont succédés, le mode pilote automatique était bel et bien activé depuis un moment… Hermétique à la douleur et à la tristesse… une fois morte, la personne n’existe plus… j’efface tout ! Maman, papa… les souvenirs s’en sont allé avec eux… Hop, ce qui n’a jamais existé ne peut pas nous faire souffrir !


Je ne vais pas décrire tous les morts entre mes 14 et mes 38 ans… l’histoire est déjà bien assez triste comme ça ! Il y en a eu une douzaine environ… elle était là, elle rôdait jamais très loin…

J’en avais une peur… c’était complètement irrationnel quand j’y pense. Je n’avais pas peur de la mort, pas de mourir… j’avais peur des morts. Ce changement d’état entre vivant et mort…

Je refusais d’ imaginer qu’il puisse exister quelque chose d’invisible. Quand certains ressentis s’imposaient à moi, je les balayais rapidement. Il y a plus de morts que de vivants dans mon histoire alors… comment vivre avec tout ça autour de moi ? Tout ce qui me terrorise et que je ne vois pas ?

Je vivais plutôt bien comme ça… les années passaient à une vitesse folle… déménagement dans le centre de la France pour rejoindre mon amoureux, ce besoin de partir loin… sans doute pour pouvoir oublier encore un peu mieux ! Un mariage quelques années plus tard, le souhait de fonder notre famille. Une grossesse très rapidement mais une fausse couche qui me fait flancher… impossible d’oublier cette mort là, je l’ai vécue dans mon corps… ça fait mal… beaucoup trop mal… 3 longues années avant de pouvoir réessayer d’avoir un enfant… la peur de revivre une perte était plus forte que tout ! Puis la magie a opéré, mon bébé arc en ciel est arrivé en 2016 et mon bébé soleil en 2023.


L’invisible s’imposait à moi doucement…j’avais fait des constellations familiales il y a des années… sans savoir ce qui se jouait exactement sous mes yeux… l’invisible était pourtant bien là mais j’étais pas en capacité de l’accepter.


J'ai tenté bien plus tard les soins énergétiques, qui m’ont fait un bien fou pour gérer les ennuis, le stress du boulot et de la vie en général… parce que pour moi ces histoires de deuil étaient réglées… ça fait plus de 20 ans que c’est passé… c’est fait, c’est réglé… on en parle plus ! …tout va bien, on sourit et on ne flanche pas!



Crédit photo - Priscilla Gissot

Effectivement, je m’en étais persuadée jusqu’à ce jour du mois de juin où mes yeux ont croisé ceux de Sylvie… des mois et même des années que l’univers s’alignait pour que CE moment arrive… un instant suspendu entre les sapins et les tipis… ce qui s’est passé, je ne sais pas l’expliquer parce qu’il faut le vivre… j’ai senti et j’ai vu l’invisible… et c’était d’une douceur… plein d’amour et de tendresse qu’elle m’a fait ressentir à travers ce regard. La peur a commencé alors doucement à se transformer… je n’étais pas seule, j’étais entourée et Sylvie était là, j’avais confiance… personne ne pouvait me faire de mal !


On a discuté… je lui ai raconté mon histoire… enfin pas la vraie histoire… celle que j’avais décidé de rendre acceptable… celle qui disait que tout va bien, je ne me souviens pas de mes parents mais tout est ok… c’était il y a longtemps ! C’est du passé tout ça ! Tout va bien, on sourit et on flanche surtout surtout pas…

Sur ce coup, là, j’ai pas tenu longtemps… en quelques phrases, mon joli château de cartes s’était cassé la figure… elle a su avec toute sa douceur remettre en question toutes mes certitudes… et me mettre face aux rouages compliqués et aux barrières, chaînes, barricades… que mon inconscient avaient mis en place pour que je puisse vivre malgré tout…. Malgré l’inadmissible… le manque, la tristesse…

J’en ai vu des psychiatres, psychologues… thérapeutes en tout genre… jamais personne ne m’a parlé de ça… même quand je courrais après mes souvenirs, on me disait seulement que « petit à petit ça reviendrait» « tu as vu beaucoup de choses difficiles, ça a pris le dessus sur le reste… c’est normal ! »

Non… ça ne reviendra pas et non… ce n’est pas normal ! Je me suis protégée et il fallait que je sois prête à admettre l’inadmissible… à affronter, la douleur, la tristesse, le manque…

La prise de conscience a été un peu rude, j’ai eu l’impression d’avoir perdu beaucoup de temps…

Mais ça y est… ça a commencé… le chemin est long pour défaire ces rouages compliqués mais jour après jour, je réintègre dans ma vie cette histoire qui a fait que je suis moi aujourd’hui ! Et surtout j’accepte l’invisible et je n’en ai plus peur…


Le grand tournant sur ce long chemin est ma participation au « Week end Thana : parler de la mort » qui s’est déroulé il y a peu de temps dans un endroit formidable.

D’atelier en atelier, de discussion en partage, de médiation en voyage au tambour… nous étions dans la vie, dans la joie… tout en parlant de la mort.

C’est lors de ce week-end que ma vision de la mort a complètement changé… je n’ai plus peur, je ne vois plus ce changement d’état de vivant à mort comme quelque chose d’effroyable… l’idée que la petite fille de 7 ans s’en était faite a été balayée par cette fluidité et ce naturel pour en parler tous ensemble, ce temps de réflexion que je me suis accordé après tant d’années à subir !

Accompagnée de Sylvie et de toute sa bienveillance, j’ai compris ce que c’était… j’ai vécu encore des moments d’une puissance incomparable… et inexplicable… il faut vraiment le vivre !

Malheureusement la mise en pratique a eu lieu plus rapidement que ce qu’on l’aurait voulu…

Un décès dans la famille de mon mari… Il a fallut assister aux longues cérémonies… et j’ai senti la différence, ce changement qui avait lieu… j’étais dans la tristesse mais je n’étais plus dans la peur !

Un corps mort, sans vie, dans cette pièce, dans le cercueil… c’était ok ! Et j’ai même eu la chance de pouvoir le sentir là, avec nous et apaisé.

Ce week-end a changé énormément de choses… pour ne pas dire qu’il a tout changé en fait… j’y ai non seulement rencontré des personnes extraordinaires qui m’ont redonné un peu d’espoir dans l’être humain mais je me suis débarrassée de cette peur de petite fille qui m’a collé à la peau pendant plus de 30 ans.

Prendre un temps pour parler de la mort et ce qu’elle évoque pour chacun devrait être un passage obligatoire parce qu’en venant au monde, on doit accepter d’y être confronté un jour et s’y préparer. On vit les choses différemment une fois que c’est fait… Dans les moments douloureux, on ne peut pas en parler comme on en parle dans ces espaces de parole. La pudeur, les émotions font que chacun est centré sur lui-même. Alors que pour sortir de cette peur, il n’y a rien de mieux que le partage et s’apercevoir que nous ne sommes pas seuls... avec l’accompagnement de Sylvie en guise de cerise sur le gâteau. 💖



Parterre de feuilles vert d'eau givrées. Des petits cristaux blancs recouvrent les feuilles, ils bordent chaque feuilles  leur conférant un  aspect piquant .




Je suis vraiment touchée de ce récit car la première fois que j'ai croisé Aurélie son système avait mis en place un mécanisme de défense puissant, et on comprend aisément pourquoi : tout oublier. Elle l'analyse très bien en disant « ce qui n’a jamais existé ne peut pas nous faire souffrir ».


Ce qu'elle partage vient totalement résonner avec le sujet que j'aborderai dans mon prochain article de blog, déjà en cours. Nous sommes constitués de notre passé, et notre mémoire est porteuse des informations indispensables à notre mieux être. A travers elle, notre passé est vivant, il vit en nous et avec nous et qu'on le veuille ou pas, il nous aide à nous définir et surtout il évolue en même temps que nous.

En bloquant la mémoire, le système protège et c'est la priorité au moment où il le fait mais il prive aussi, il nous prive d'une part de nous et nous restons perdus, errant... sans passé et sans avenir possible... nous avançons dans notre vie comme des morts vivants.

Ici la témoignage d'Aurélie nous offre la preuve du bénéfice à parler de la mort, à vivre pleinement son deuil pour vivre librement. Le chemin est long, nous disons que nous vivons le deuil, pourquoi ? Bien sûr car il est processus naturel mais surtout parce qu'il est une transformation que nous incarnons pour toujours.



Photo avec un fond ocre jaune laissant apparaître dans le flou des branches foncées et claires donnant une impression de traits en arrière plan. Au premier plan, une branche d'amandier recouverte de fleurs blanches, le pistil ressemble à de grands cils maquillés. Le coeur des fleurs a des teintes jaunes et sous certaines de petites feuilles apportent une teinte vert clair. Posé sur la branche, au milieu des fleurs, un papillon, noir, blanc et orange. Il porte de grandes antennes bien droites au bout desquelles deux petits points blancs. Sur les parties noires des ailles sont dessinées des tâches blanches. Les ailes sont relevées et se touchent presque laissant apparaître le corps marron du papillon.


Ce récit d'Aurélie est puissant et je sais qu'il vous aura touchés. Je souligne sa puissance dans la mise en évidence d'une chose importante, peut-être l'aurez-vous perçu. Je m'adresse ici aussi à Aurélie car c'est un cadeau qu'elle nous fait, qu'elle me fait. Lequel ? Celui de pouvoir goûter et poser ce qui suit :

l'accompagnement Thana du processus de deuil permet de passer de l'espoir à l'espérance.

L'espoir qui nous fait attendre et désirer quelque chose de meilleur laisse place doucement et tendrement à l'espérance, cette confiance pure et désintéressée en la vie.

Merci.

L'accompagnement Thana est proposé en individuel ou en groupe (famille...).

Le premier pas est parfois difficile, le sujet est encore tabou, empreint de superstition et surtout de peur, c'est pourquoi je propose régulièrement les ateliers Thana, parler de la mort où l'espace est ouvert aux témoignages, au questionnement etc...

Et il y a aussi ce dont vous a parlé Aurélie les week-end Thana, parler de la mort, stage de 2 jours ½ voire 3, une immersion totale dans son intime pour se libérer et être en mesure de reconnaître et d'accepter les deuils symboliques, pour se libérer et laisser la place au deuil avec ses émotions et ses étapes.


Accompagnement Thana
Le deuil, seul... ensemble

* Crédit Photos - Aurélie C.

et Or-photographie




Logo : une spirale dessinée en noir sur fond blanc. Elle se déroule vers la droite, en bas au centre, elle est coupée par un trait vertical petit, lui-même coupé à l'horizontal à son milieu par un trait courbe, semblable à la courbe de la spirale, en bas, détaché un point. A gauche, la spirale s'arrête et laisse place à un point, un peu plus loin un autre point suivi par une larme dans la courbe de la spirale.

1 commentaire

Posts récents

Voir tout

1 Comment


Amandine
Oct 25, 2023

Wow... quelle claque !

Merci à toutes les deux.

❤️❤️❤️

Like
bottom of page